Le PIB : L'Art de la Tromperie Économique


Introduction

En Juillet, Bruno LeMaire a salué l’excellente performance de l’économie française suite à la hausse du PIB.

Pourtant, la plupart des économistes que je lis ou écoute soutiennent que l’économie de la France va très mal, et que l’on fonce droit dans le mur à grande vitesse.

J’ai creusé le sujet du PIB et de la dette, puis j’ai écrit cet article expliquant comment le PIB permet de faire croire que tout va bien alors que tout va mal.

TL;DR

Le PIB de la France concerne la production interne. Mais l’État a la possibilité de s’endetter, ce qui apporte du capital de l’extérieur. Il peut ensuite utiliser ce capital pour créer de l’emploi public, et donc augmenter le PIB.

Une citation célèbre de l’économiste Keynes résume très bien la chose : “Si vous payez des gens pour creuser un trou, et d’autres pour le reboucher, vous créez du PIB”.


Je ne suis pas économiste. Si vous chercher un article écrit par une personne légitime, voici un article de Charles Gaves qui parle du PIB et qui a inspiré mon article.

Définition du PIB

Le PIB (produit intérieur brut) est un indice qui permet de mesurer l’activité économique d’un pays au cours d’un période donnée. On l’utilise principalement pour suivre l’évolution économique de ce pays dans le temps, ou pour le comparer à d’autres pays.

Le PIB peut se calculer de 3 manières. En théorie, toutes donnent le même résultat, mais prit sous un angle différent.

Sous l’angle de la production

PIB = somme des valeurs ajoutées + impôts - subventions

La valeur ajoutée d’une entreprise correspond à la valeur de sa production hors taxes, diminuée des coûts intermédiaires.

Ces coûts intermédiaires comprennent les biens et services consommés pour produire, comme les matières premières ou l’énergie. Toutefois, les salaires des employés, bien que fondamentaux pour la production, n’en font pas partie. Nous reviendrons sur cet aspect plus tard.

Quand on parle d’impôts dans le cadre du calcul du PIB, il s’agit des impôts sur la production.

On y retrouve :

  • la TVA
  • les accises, qui sont des taxes spécifiques à certains produits tels que le tabac ou l’alcool
  • les frais de douane, taxant les biens importés de l’étranger

Ces impôts n’affectent pas la valeur ajoutée des entreprises, mais impactent le consommateur.

Pour obtenir le PIB par la production, il reste à soustraire les subventions aux valeurs ajoutées et aux impôts.

En effet, les subventions ne représentent pas une création de valeur, mais un transfer de richesse du secteur public au secteur privé, financé par les impôts prélevés par l’État.

Ne pas les soustraire reviendrait à comptabiliser ces montants deux fois :

  • D’une part, dans les impôts collectés par le secteur public.
  • D’autre part, dans les valeurs ajoutées du secteur privé, ce qui fausserait la représentation réelle de l’activité économique du marché.

Pour mieux comprendre cette correction, imaginons qu’une entreprise paye 200€ d’impôts, mais reçoit 75€ de subventions. L’impôt net payé est donc de 200 - 75 = 125 €, d’où l’importance de soustraire les subventions dans le calcul global (d’où impôts - subventions).

Sous l’angle des dépenses

PIB = C + I + G + (X − M)

  • C représente la consommation des ménages.
  • I est l’investissement, incluant à la fois l’investissement privé et public.
  • G correspond aux dépenses publiques, c’est à dire les dépenses du gouvernement pour les biens et services.
  • X indique les exportations de biens et services.
  • M représente les importations de biens et services.

Cette formule peut être simplifiée ainsi :

PIB = Consommation intérieure + Exportations – Importations

Les exportations étant de la consomation extérieur produite à l’intérieur

Les importations étant de la consommation intérieur produite à l’extérieur

Or il est question de la production intérieure, d’où la soustraction des importations.

Sous l’angle des revenues

PIB = ensemble des revenus + impots - subventions

Les exportations sont considérées comme de la consommation extérieure produite à l’intérieur du pays, tandis que les importations représentent de la consommation intérieure produite à l’extérieur.

Cependant, comme le calcul du PIB se concentre sur la production intérieure, il est nécessaire de soustraire les importations.

Le budget de l’État

Les impôts

L’État prélève des impôts sur le privé, qui constituent une partie essentielle de son budget.

Ce montant provient de la valeur créée par le secteur privé, redistribué sous forme de revenues aux consommateurs. En prélevant ces impôts, l’État prive les consommateurs d’une partie de leur budget, pour financer sa propre consommation.

Il y a un transfer de richesse du secteur privé vers le secteur public, qui n’affecte pas le PIB. Ce dernier reste inchangé.

La dette

Lorsque les impôts ne suffisent pas à financer les dépenses de l’État, telles que les retraites confortables d’anciens présidents (apparemment ce n’est pas cher puisque c’est l’État qui paie), l’État peut recourir à l’endettement.

La dette est émise via des obligations sur le marché. Ces obligations peuvent être achetées par des entités publiques ou privées.

Contrairement aux impôts, qui représentent un transfert de richesse et ne modifient pas le PIB, la dette est un apport extérieur au pays, ce qui augmente le PIB sans qu’il y ait réellement de création de valeur.

La dette : un impôt différé et peu démocratique

Le budget de l’État provient soit des impôts, soit de la dette. Le seul moyen de venir à bout de la dette est donc de recourir à l’imposition.

  • Soit la production reste la même ou diminue, mais les impôts augmentent.
  • Soit les impôts demeurent les mêmes ou diminuent, mais la production augmente.

La principale différence réside dans le fait que les impôts sont votés par les représentants élus, tandis que la dette ne l’est pas. Bien que nous vivions dans apparement une démocratie, l’État français s’endette depuis des années sans que l’on nous demande notre avis.

Nous savons râler lorsque nos impôts augmentent, mais beaucoup semblent satisfaits de vivre au-dessus de leurs moyens depuis des décennies. Cependant, il viendra un moment où nous ne pourrons plus emprunter, et où il faudra passer à la caisse.

There Ain’t No Such Thing As A Free Lunch - Milton Friedman

Les dépenses de l’état

Si les dépenses de l’État sont bien orientées, elles peuvent avoir un impact significatif sur la production à long terme.

Une deuxième part de tarte à la cantine de l’Assemblée nationale ne fera grossir que la panse du ministre. En revanche, une population en meilleure santé et mieux éduquée entrainera sans aucun doute une hausse de la production.

En France, il devient de plus en plus difficile de trouver un médecin, et le niveau scolaire ne fait que de décliner. Les ministres quand à eux semblent bien nourris.

Si l’État augmente les impôts, les ménages seront privés d’une plus grande part de leur pouvoir d’achat. Le risque est que la productivité à long terme diminue si l’État n’investit pas ces fonds de manière à accroître la productivité du pays. En revanche, la dette, qui est un apport extérieur, n’impacte pas directement le consommateur. Au contraire, celui ci peut voir son niveau de vie se maintenir voire s’améliorer, même en l’absence de création de valeur.

Tuto : Comment faire croire aux Français que tout vas bien

Une citation célèbre de l’économiste Keynes résume parfaitement la situation :

Si vous payez des gens pour creuser un trou, et d’autres pour le reboucher, vous créez du PIB.

L’État s’endette et embauche des fonctionnaire pour creuser un trou, puis pour reboucher ce même trou.

Ces fonctionnaires reçoivent un salaire, mais ce salaire ne provient pas des impôts : il provient de la dette, donc de l’extérieur. Cela fait gonfler le PIB et réduit le taux de chômage, ce qui donne l’illusion d’un gouvernement efficace.

En France, creuser des trous est sans doute jugé trop fatiguant. Cependant, l’État français fait preuve de créativité et a trouvé d’autres manières de générer des emplois inutiles.

En 2023, j’allais toutes les semaines à Paris. Entre la gare du Nord et mon lieu de travail en début de matinée, je croisais un grand nombre d’agents de traversée. Ces personnes, équipées d’un gilet jaune et d’un panneau stop, faisaient la circulation aux passages piétons.

Pourtant, le passage piéton en lui même remplit déjà sa fonction. Embaucher un fonctionnaire pour effectuer le travail que quelques bandes de peinture blanche sur la route peuvent accomplir, il fallait y penser.

À quand le feu tricolore humain financé par nos impôts ?

Le privé peut aussi s’endetter. Et pourtant, on en fait pas tout un plat ?

Tout comme le secteur public, le secteur privé peut s’endetter. Mais les conditions et les raisons de cet endettement sont totalement différentes.

Premièrement, le privé s’endette pour générer plus de profits

On peut imaginer une usine qui s’agrandit, un magasin qui s’implante dans une autre ville, une startup qui recrute pour accélérer son expansion, ou encore un individu contractant un crédit pour acheter une voiture afin d’accéder à un emploi mieux rémunéré dans la grande ville voisine.

Deuxièmement, les contraintes d’endettement sont beaucoup plus strictes.

Lorsque qu’un ménage achète une maison ou souhaite obtenir un prêt à la consommation, le montant maximal de l’emprunt et les modalités de remboursement sont déterminés par ses revenus. Pour financer un projet d’entreprise, il faut d’abord convaincre la banque de la viabilité du projet.

Et en cas de faillite :

  • Des biens peuvent être saisies pour rembourser la dette.
  • La personne en défaut de paiement est tenue responsable, ce qui aura un impact significatif sur ses futurs prêts.

Dans le cas de la dette publique, la situation est complètement différent.

Les États sont considérés comme éternels, contrairement aux entreprises. La dette publique est perçue comme fiable à long terme, même si le remboursement s’étale sur plusieurs générations.

  • L’État peut continuer à s’endetter tant qu’il trouve quelqu’un pour lui prêter de l’argent. Les contraintes ne sont pas aussi strictes que pour le secteur privé.
  • En cas de défaut, le pays ne peut pas être saisi. Cependant, celui-ci subira une perte de confiance à l’international pendant quelques temps.
  • Un État a la possibilité de monter les impôts pour rembourser sa dette. Dans le secteur privé, on fait faillite. Mais l’État peut voler l’argent de ceux qui travaillent et créent de la valeur pour réparer ses erreurs. Plutôt pratique, n’est-ce pas ?
  • Les pays qui contrôlent leur monnaie peuvent en émettre davantage. La situation est différente pour France, puisque l’euro est géré par la BCE à l’échelle européenne. Le risque principal étant l’inflation (car cette monnaie émise doit être récupérée pour un retour à la normale) et une dévaluation de la monnaie (émettre de la monnaie sans valeur créée derrière, ce n’est pas l’idéal).
  • Il n’y a aucun responsable. Les dirigeants changent, la dette reste. Les gouvernements se succèdent et se passent la patate chaude. Personne n’est directement responsable, et c’est un problème récurrent du secteur public. In fine, ce sont les citoyens qui paient l’addition. Les élus n’ont souvent aucune vision à long terme, se concentrant uniquement sur leur mandat.

La dette privée est donc beaucoup plus rationnelle que la dette publique, et orientée vers le profit. Elle a un impact concret sur le PIB, contrairement à la dette publique.